lundi 15 février 2016

III.1.4. L'EMPREINTE ROYAL FLEURIT


3.1.4. L'Empreinte royale fleurit  

A UNE VILLE QUI REND HOMMAGE AUX ROIS 

L'arc de la porte Saint-Denis honore Louis XIV (construite en 1674)

En bref

  • Rues droites et monarchie
  • Les Invalides : des rues droites convergent vers un tombeau. Pour qui ?
  • Des places royales se multiplient
  • La dernière place anticipe le changement

 *     *     *

Suite,

dimanche 14 février 2016

RUES DROITES ET MONARCHIE


À L'APOGÉE DE LA MONARCHIE, TOUTES LES RUES DROITES CONDUISENT VERS UN SYMBOLE DE ROYAUTÉ
(VERS 1600-1750) 

Elles sont :

  • Celles qui conduisent aux places royales, aux centre desquels était une statue équestre du roi régnant (pour l'exception de la place Dauphine, cliquez) :



Une rue droite joint un terrain de foire (à l'actuelle gare de l'Est) à la porte Saint-Martin.
 
        Zoom (déroulez)
Une rue droite joint le terrain de foire (le site de Gare de l'Est aujourd'hui) à l'arche qui honore Louis XIV.

  • À Versailles et à ce que devait être le mausolée de Louis XIV trois lignes droites convergent : la page qui suit explique.
  • Un feu d'artifice de l'Ancien Régime : on nomme la place devant la nouvelle barrière d'octroi la place du Trône (aujourd'hui place de la Nation) pour rappeler l'entrée royale de Louis XIV. La rue qui l'unit à Paris est droite :
L'ensemble est construit en 1787... .

# # #

Il n'y a pas d'exception. Même à l'église Saint-Paul Saint-Louis, construite pour glorifier la monarchie mais qui n'en est pas un symbole, la rue est décalée :



À partir de 1750 environ, cela change :



Des rues droites dirigent le regard vers
 une église (le Panthéon, en 1758) 
et un théâtre (l'Odéon, en 1779).

La royauté faiblit.

*     *     *

Suite,
Les Invalides : des rues droites convergent vers un tombeau.


samedi 13 février 2016

LES INVALIDES : TROIS RUES DROITES CONVERGENT VERS UN TOMBEAU. POUR QUI ?

LE « TOMBEAU DE NAPOLÉON » N'A PAS ÉTÉ CONSTRUIT POUR LUI : LOUIS XIV PRÉVOYAIT L'IMMENSE MONUMENT, L'ACTUEL MUSÉE DE L'ARMÉE, POUR Y REPOSER SOI-MÊME

Mais on ne le dit pas.


   Louis XIV visite l'Hôtel des Invalides de Pierre-Denis Martin, 1706 / zoom 

# # #

Quand les maisons étaient basses le dôme survolait la ville et il domine toujours une grande partie de la rive gauche :

           La place Louis XVI (la place de la Concorde) en 1829 de Giuseppe Canella, 1829 / zoom 
              L'Hôtel des Invalides au coucher du soleil ©  Frédéric Reglain / zoom

Louis nomma l'ensemble « Les Invalides » parce que des vétérans blessés y étaient soignés (certains le sont encore). Le nom évoque un roi bienveillant qui prend soin de ses troupes :

Louis visite les veterans de Maurice Leloir, 1931

 « En 1670, le roi Louis XIV fonda l'Hôtel National des Invalides 
afin de loger et soigner les vétérans de ses guerres. 
»


« Des invalides aux Invalides »

# # #

Mais comment l'aide aux soldats peut-elle être le motif du lieu quand rien ne les indique — et quand tout élément conduit au dôme ? 

  • Trois lignes convergentes soulignent l'entrée de l'ensemble et le dôme : celles qui accentuent le dôme sont construites les premières.
-- Pascal Payen Appenzeller, historien de Paris, communication personnelle

Internet, sans indication de source  

Vue aérienne / zoom


  • Le seul autre exemple de lignes convergentes est à Versailles :

  Versailles en 1668 de Pierre Patel zoom
  • Le dôme survole un vide qu'il faut au moins vingt minutes pour traverser : 

          Les lignes jaunes montrent un emplacement, les rouges un trajet /zoom.

Claude Abron
Cette photo s'arrête au portail avec le drapeau (regardez très attentivement).

    • La seule image de l'ensemble est celle-ci, de Louis à cheval au dessus du portail... 



    • Elle conduit à une cour si vaste qu'on ne remarque guère les canons ou les portes de l'église...


    • Elle est suivie d'un long parcours de mur nu.

    # # #

    Enfin on arrive au dôme, qui survole un tombeau...

         Claude Abron

    Mais c'est Napoléon qui y repose.

    # # #

    Les dernières guerres de Louis XIV ont duré une génération, 
    de 1688 à 1713, avec une pause de cinq ans. Il a du faire fondre sa superbe vaisselle en argent. Beaucoup de nobles et de soldats sont morts au combat. Des pauvres sont morts de faim et de froid. 

    • Cette dame de la noblesse, Marguerite de Choiseul (1647-1737), a perdu deux de ses fils à la bataille de Turin et un troisième est mort à cause de la guerre indirectement ; tous en 1706.

         « Charger les Français, Bataille de Turin » zoom
                     Château de Condé - Aymeri de Rochefort

    • Les soldats étaient souvent enrôlés de force, à moins de s'engager pour ne pas mourir de faim. « La famine, qui désola la campagne, fut une ressource pour la guerre : ceux qui manquaient de pain se firent soldats. Beaucoup de terres restèrent en friche ; mais on eut une armée ». 

    --  Voltaire, Le Siècle de Louis XIV, ed. 2015, p. 358.
    •  La guerre a rendu l'hiver de 1709, le plus froid du siècle,* encore plus terrible.
    * Le vin gelait dans le verre du roi.


           La Misère des paysans, « Histoire de France » de François Guizot, 1875

    Louis était si haï qu'un mausolée parisien était impensable, et ses restes ont été emmenés à la nécropole royale de Saint-Denis (en 1715) « J'ai vu de petites tentes dressées sur le chemin de Saint-Denis. On y buvaient, on y chantaient, on y riaient. »
    -- Le Siècle de Louis XIV de Voltaire, ed 2015, note p. 474.

    Comme le château de la Belle au Bois Dormant, la sépulture est restée vide pendant un siècle. 
    (En fait plus, jusqu'en 1836)

    # # #

    Chaque aspect du site colossal concerne Louis XIV,
    et rien ne se réfère aux soldats. 
    Pourquoi alors les souligner en effaçant le roi ?

    La raison directe est simple :
    Les Invalides, devenus le Musée de l'Armée,
     exaltent la gloire militaire de la France
    et l'absence royale révèlerait son coût humain.

    Plus étonnant : 
    Ni les historiens que j'ai lu
    ni les guides aux visites desquels j'ai assisté
    ne mentionnent cette carence.

    Le publique écoute et ne dit rien. 
     
    *    *    *

    jeudi 11 février 2016

    LES PLACES ROYALES SE MULTIPLIENT


    PARIS EN A CINQ :* ILS SUIVENT LE MODÈLE DE LA PLACE DES VOSGES AVEC À LEUR CENTRE UNE STATUE ÉQUESTRE DU ROI RÈGNANT**

    * Place des Vosges et place Dauphine (vers 1600), place des Victoires et place Vendôme (vers 1685), place de la Concorde (1755).

    **À la place Dauphine, sur le pont.


           Claude Abron

     À la place des Victoires, le modèle est suivi tel quel.

    Diaporama, Louvre
    À la place Vendôme, la statue survole les immeubles : personne n'est au dessus du roi.

    La place de la Concorde est décrite à la page qui suit.


    # # #


    En province la Révolution met fin à des projets de construction,
    mais certaines places existent déjà :

    Bordeaux 

    Rennes

    Reims : exceptionnellement, le roi est debout.

    # # #

    À l'étranger, elles sont un modèle pour des capitales du XVIIIe siècle :

    Nancy en 1751, quand la Lorraine est encore indépendante

    Internet, photographe non nommé
    Copenhagen

       La Place du palais de Vasily Sadovnikov, vers 1847 / zoom
    Saint-Peterbourg
     
    Ces places font partie du rayonnement français :
    « Il parlait ce français raffiné par lequel nos grand pères 
    non seulement parlaient mais pensaient... »*
    -- Première page de Guerre et paix

    *C'était la langue des conspirateurs annonçant au Tsar Paul I qu'il était un despot et qu'il était déposé. Ensuite ils l'ont assassiné.
    -- Les Romanovs1613-1918 de Simon Sebag Montefiore, 2016, p.350.

    *     *     * 

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    mercredi 10 février 2016

    LA DERNIÈRE PLACE ROYALE ANTICIPE LE CHANGEMENT


    À LA PLACE DE LA CONCORDE, LES BOULEVERSEMENTS CONDUISENT À UNE SUITE DE SYMBOLS DE POUVOIR 

    Le dessin de la place suit celui de la place des Vosges
    (l'adaptant à la rive) : 

    Place Louis XV vers 1775 vue de la rive gauche attribuée à Alexandre-Joël Noel  / zoom


     
    Ensuite : 

    • La guillotine la remplace pour l'exécution de Louis XVI. La place est choisie pour son symbolisme et parce qu'elle seule est assez vaste pour accueillir la foule : c'est la plus grande place d'Europe.

            L'Exécution de Louis XVI de Geog Heirich Sieveking / zoom

    Le matin du 21 janvier 1793, 
    les rues sont silencieuses...

    les boutiques fermées, les volets clos. Des soldats sont alignés sur la place de la Concorde, des milliers de Parisiens muets derrière eux. 

    Un roulement de tambours couvre ses dernières paroles du roi.

    • Quand les Parisiens se détournent des spectacles sanglants (en 1794) la guillotine est déplacée hors la ville.*

    *À la « place du Trône renversé », la place de la République actuelle : pour un de ses drames, cliquez et déroulez.   

    Statue de la Liberté, place de la Concorde, de François-Frédéric Lamot, entre 1795 et 1799 / zoom
     
    Robespierre y précipite sa fin

    Il dîne avec ses alliés à un restaurant proche (Ledoyen, qui existe toujours), où se trouvent aussi des adversaires. Après le dîner tous se rejoignent sous la statue, où Robespierre évoque les exécutions futures de telle manière que les opposants se sentent visés. Ils le renversent et le guillotinent deux jours plus tard.
    -- Le dîner et la conversation, 
    Le Sept Thermidor dans « Notre-Dame de Thérmidor » par Arsène Houssaye, 1867

    • Napoleon démolit la statue quand il se fait couronner Empereur (en 1804).
    • La monarchie restaurée prévoit une statue Louis XVI, attend onze ans pour poser la première pierre de sa base... et l'oublie :

    La  place Louis XVI pendant la Restauration Internet, disparu

    Pour presque quarante ans la place est vide. 

    Fin de cette section.


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