« LA DESCENTE » ÉTAIT UN CORTÈGE ENDIABLÉ QUI DÉFERLAIT
DE BELLEVILLE À L'HÔTEL DE VILLE DE PARIS, AUX PREMIÈRES HEURES DU MERCREDI DES CENDRES
(DES ANNÉES 1820 JUSQU'AU DÉBUT DES ANNÉES 1860)
C'est à dire, de la banlieue misérable jusqu'au cœur de la ville bourgeoise, défiant la pénitence demandée par l'Église.
Les flèches jaunes montrent où se trouve ce dont on parle, les flèches rouges le parcours des promenades, comme à la page qui suit.
La Descente de la Courtille de Charles Nanteuil, 1842 / zoom |
Le tableau du Musée Carnavalet n'est plus exposé depuis la rénovation qui insiste sur les élites.
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À son origine était des taxes sur les marchandises entrant dans la ville, dues à la création d'une nouvelle enceinte. À l'est appauvri, des tavernes vendant le vin non imposé apparurent juste en dehors des portes.
(À partir de 1788)
L'Octroi de Belleville de J.-L.-G.-B. Palaiseau, vers 1790 / zoom Le Cabaret Ramponeau en bas Courtille vers 1761, anonyme / zoom |
La taverne où le vin était particulièrement bon marché.
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Ils créèrent une contre-culture exprimé par le french cancan et le cortège :
- Appelé « la danse des barrières », c'est la seule danse française conduite par des femmes. Son exubérante sexualité et des pas narguant l'autorité l'ont fait interdire à Paris : pour un exemple de sa provocation, cliquez et déroulez.
- Un roman très lu montre sa transgression, et implicitement celle de la culture dont la danse était issue :
Les Mystères de Paris de Eugène Sue, 1848
Des danseurs s'échauffent avant d'assister à l'exécution de deux femmes à une barrière du sud (proche de l'actuel métro Saint-Jacques). Quand ces « cannibales » se précipitent pour assister à l'exécution, l'héro, un prince à cheval, les disperse.
- « La Descente de la Courtille »* est un autre défi moqueur : les Bellevillois font la fête toute la nuit et à l'aube s'élancent vers Paris, costumés et ivres. Des bourgeois se joignent à eux pour s'encanailler, ou louent des emplacements pour les voir passer.
*« Courtille » : une petite cour devant une ferme et le nom initial du carrefour de Belleville
La Bibliothèque historique de Paris, Facebook, sans autre information
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Le défilé révèle l'hostilité de classe longtemps avant que le conflit éclate :
- Le Carême, six semaines avant la Crucifixion, est pour les chrétiens un temps de jeune et d'abstinence pour penser à la mort du Christ et au sien. Il commence par le Mercredi des Cendres, quand on porte sur le front une croix de cendres en signe de pénitence.
Strasbourg, 2014 / zoom |
- Mardi Gras vient immédiatement avant le Mercredi des Cendres. Sa license est tolérée comme contraste avec l'austérité à venir.
La Nouvelle Orléans, 2011 / zoom |
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En 1860 l'État transféra le mur d'octroi aux lointaines fortifications. Ainsi il établit son contrôle sur les périphéries turbulentes, par exemple permettant à la police d'arrêter des rebelles qui s'y réfugiaient.
Adapté de Fortifications de Paris et de ses environs, 1841 / zoom
La Bonne Ville de Paris et ses nouveaux enfants par Charles Vernier, Le Charivari, 1850 / zoom
Le Gouvernement bienveillant frotte La Villette, qui avait résisté à la mainmise de l'État avec une véhémence particulière ; Belleville essuie son nez avec sa main ; Bercy, où on stock le vin, boit au goulot.
Seule la fillette bien habillée des Batignolles, à l'ouest prospère, se comporte correctement.
Déplacer l'octroi mit fin aux tavernes et donc à La Descente.
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L'industrialisation l'aurait stoppé de toute façon,
en donnant aux pauvres moins de paie et moins de temps libre.
Mais repousser les barrières hâta sa disparition.
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