samedi 2 janvier 2016

COMMENT LA FRANCE EST DEVENUE UNE RÉPUBLIQUE


LE DERNIER ROI DE FRANCE TOURNE LE DOS AU PUBLIC

          Claude Abron
La statue de Louis-Philippe à la Chapelle royale de Dreux,
une petite ville à une heure de Paris

Quand Charles X, héritier de la branche ainée Bourbon est renversé en 1830, le chef de la branche cadette, Louis-Philippe, devient roi. En 1848 il est culbuté lui-même.

Ni lui ni sa famille ne reposent à Saint-Denismais ont leur propre mausolée (ci-dessus). La raison concerne son père, Philippe, duc d'Orléans, dit « Philippe Égalité ».

Son histoire explique la disparition non pas d'un roi ou d'une dynastie, mais de la monarchie elle-même : 

 Philippe de Pique / narration


  • Il se trouve ensuite face à l'obligation de voter publiquement Oui ou Non à la mort du roi. Il promit à sa famille de voter Non. Mais tremblant de terreur devant l'ouragan qu'il avait aidé à créer, il vota « Oui » à l'exécution de Louis XVI, son cousin.

  • On dit son vote décisif. En fait, le « Oui » gagna par douze voix et non pas par une seule. Mais les légendes effacent les détails pour souligner l'essentiel, ici la trahison du prince.

  • Quand son fils, le futur Louis-Philippe, impliqué dans la disgrace d'un général s'enfuit à l'étranger, Philippe Égalité est guillotiné lui-même (en novembre 1793). 
Zoom
  • Ses derniers mots : « Dépêchons-nous ». Comme presque tous les nobles, il est mort avec courage.

Il était facile à manipuler : « Ils ont eu de Votre Altesse tout ce qu'ils pouvaient en avoir, et ont fait ce que je fais de ce citron dont tout le jus est exprimé », dit la relation avec lequel il déjeune quand on vient l'arrêter, en pressant un citron sur une sole et en le jetant au feu.

Bon vivant, profondément amoureux deux fois, excellent père, charitable de façon souvent désintéressée, très conscient du bien-être de ses domestiques, optimiste, naïf, « Ce n'était pas un méchant homme », a dit Napoléon après avoir lu ses papiers.
-- Philippe Velléité dans « Choderlos de L'Enclos »,  1985, 
de Georges Poisson, est un récit bref et équilibré
.
# # #

Les gouvernements français ont pris des formes variés jusqu'aux années 1870, quand un retour à la monarchie
semblait probable (à suivre). 


Mais les royalistes étaient divisés :

  • Les « Légitimistes », membres de la vielle noblesse terrienne, soutenaient l'héritier de la branche aînée des Bourbons (Henri V, le comte de Chambord), qui a cinquante ans n'avait pas d'héritier.

  • Un « Orléaniste » prendrait donc la succession. Les financiers et les industriels le souhaitaient, mais leurs intérêts heurtaient ceux de l'ancienne noblesse.

Ce candidat, Henri d'Orléans, duc d'Aumale, était le petit-fils de Philippe Égalité :

Le duc d'Aumale
Une monarchie aurait évolué comme toute société industrielle, avec l'école primaire obligatoire et vote universel masculin, et aurait pu réprimer les grèves avec moins de férocité que la République : Charles X et Louis-Philippe ont abdiqué plutôt que d'utiliser toute leur force contre leurs peuples, et Louis XVI ne l'utilisa pas du tout.

Son milieu appelait la République « la gueuse », mais le duc lui légua le château de Chantilly et sa collection d'art, seconde qu'à celle du Louvre.

Avec sa grâce de la vielle noblesse — « Nous parlons, il cause » — il n'aurait pas été un mauvais choix.  


 Le monde des Légitimistes était révolu
et sans la mémoire de ce vote régicide,
ils auraient probablement fini par accepter le duc.

Mais ce souvenir brûlant les a enfin convaincu que
 « La République est la forme de gouvernement
qui nous divise le moins,
à condition d'être conservatrice. » 
-- Adolphe Thiers, fondateur de la Troisième République

Ainsi la France est devenue une république 
par défaut. 

*     *     * 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire