dimanche 9 septembre 2018

UNE PLONGÉE DANS LA SORCELLERIE DU XVIIe SIÈCLE


L'ÉLITE AUSSI CROYAIT AU DIABLE ET À LA MAGIE NOIRE

-- L'Affaire des poisons : alchimistes et sorciers sous Louis XIVde J-C. Petitfils, 1977 
-- Louis XIV et l'affaire des poisons : les grands scandals de l'Histoire, You/Tube , 2020

« ...ils [des courtisans]couraient chez quelque prêtre dévoyé
afin d'y faire dire une messe au Diable avec égorgement d'enfant. 
Le commerce du poison suivait habituellement ces sortilèges : 
ce que le Diable n'avait pu faire, l'arsenic le ferait plus sûrement. »
--  L'Allée du roi, roman historique de Françoise Chandeneggor, 1981

Madame de Montespan, le grand amour du Roi-Soleil, « Secrets d'histoire » / YouTube
Des bébés ou des jeunes enfants étaient baptisés avant d'être égorgés. Ensuite leur sang était versé dans une calice et de là sur le ventre nu de la cliente.

En disant « la cliente » ou « la sponsor », les textes suggèrent un crime féminin. 

Le prêtre qui pratiquait ces messes avec La Voisin (continuez) assassinait ses propres enfants. 

La rue Beauregard, du côté ville du Boulevard :


              Carolyn Ristau
La Voisin habitait au n° 24.

« La Voisin », la plus notoire des rares tueurs en série français, se targueait d'avoir commis 2500 meurtres, par des avortements,* des empoisonnements et des messes noires.  

* Criminalisés jusqu'en 1975.

 Catherine Deshayes, veuve Monvoisin, dite La Voisin, de Antoine Coypel,1680-1682/ zoom

  • Quand un informateur de la police entend une femme ivre se vanter d'une clientèle « de duchesses, de marquises, de seigneurs et de princes »une enquête est lancée. On trouve du poison chez elle. Des interrogatoires conduisent à saisir deux cent personnes.
  • La Voisin est arrêtée sur les marches de l'église de sa paroisse après la messe.

Notre-Dame de Bonne-Nouvelle
 L'église médiévale a brûlé (en 1821). Celle-ci la remplace.

Une tueuse en série aller à la messe ? La magie noire est un sacrilège, dont l'impact dépend de la croyance.

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Une mort énigmatique
-- Correspondence de Madame de Sévigny,
 le 23 février 1680

  • La Voisin boit et chante avec ses gardiens entre les séances de torture et la nuit avant son supplice, « toute brisée qu'elle était, à faire la débauche avec scandale ». 
  • Devant l'échafaud elle rejette l'habituel discours de pénitence et de louange du roi, bien que cela aurait pu aider sa fille emprisonnée. Elle hurle et donne en jurant des coups de pied à la paille jusqu'à la fin.

Elle refuse même de se confesser à un prêtre, choisissant donc, étant croyante, de perdre son âme.

 
 « Une de ces misérables,
 qui fut pendue l'autre jour...

avait demandé la vie à M. de Louvois [le ministre chargé des exécutions] et qu'en ce cas elle dirait des choses étranges ; elle fut refusée. "Eh bien ! dit-elle, soyez persuadé qu'aucune douleur me fera dire une seule parole." On lui donna la question ordinaire, extraordinaire, et si extraordinaire, quelle pensa y mourir, comme une autre qui expira, le médecin lui tenant le pouls, soit dit en passant. Cette femme souffrit donc tout l'excès du martyr sans parler. On la mène à la Grève [l'Hotel de Ville, lieu d'exécution] ; avant d'être jetée, elle dit quelle voulait parler ; elle se présente héroïquement : Messieurs, dit-elle, assurez M. de Louvois que je suis sa servante, et que je lui ai tenu ma parole ; allons, qu'on achève." Elle fut expédiée à l'instant. Que dites-vous de cette sorte de courage ? Je sais encore mille petits contes agréables comme celui-là ; mais le moyen de tout dire? 

« On croit qu'il y aura qu'il y aura de grandes suites qui nous surprendront. »
-- La même lettre
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Des soupçons concernent l'élite.

  • La plupart des récits d'empoisonnements commencent par l'histoire de la marquise de Brinvilliers, qui empoisonna son père et ses frères après s'être exercée sur des malades à l'Hôtel Dieu. 
  • Avant son exécution (en 1676) elle dit que son crime était courant parmi les personnes haut placées... .

Marie-Madeleine Anne Dreux d'Aubrey, Marquise de Brinvilliers, sans autres informations / zoom avec une courte histoire

Après la mort de La Voisin un crime qui n'a jamais été élucidé
oblige le roi à arrêter l'enquête.  

  • Des témoins accusent Madame de Montespan, la favorite, d'avoir sponsorisé des messes noires et même d'avoir tenté d'empoisonner Louis et sa nouvelle maîtresse.

Portrait d'une dame, supposée Madame de Montespan d'un disciple de Pierre Mignard, XVIIe siècle  / zoom 

Superbe, caustique et explosive, d'une lignée plus prestigieuse que celle du roi (ses aïeuls maternels étaient les Médicis, banquiers parvenus), son éclat ajouta à celui de la cour.

 « ...mais sérieusement, c'est une chose surprenante que sa beauté [...] Elle était toute habillée de point de France ; coiffée de mille boucles ; les deux des tempes lui tombaient for bas sur les deux joues ; des rubans noirs sur la tête, des perles [...] embellies de boucles et de pendeloques de diamant de dernière beauté [...], en un mot, une triomphante beauté à faire admirer à tous les ambassadeurs. »

-- Correspondence de Madame de Sévigny,
                   le 29 juillet 1676 


Madame de Montespan et ses enfants par Pierre Mignard, 1673 / zoom 
La favorite et les quatre enfants survivants, des sept qu'elle eut avec Louis XIV.

Elle avait visité La Voisin pour des aphrodisiaques... .

  • Pour éviter que le crime n'éclabousse pas le trône, Louis arrête l'enquête et brûle les témoignages. 
  • Il ne sait pas que le chef de police a fait des notes détaillées, qui semblent inculper la femme de chambre de la marquise. Elle avait eu une aventure avec le roi et était furieuse qu'il ne reconnaisse pas leur enfant. On la comprend :  il a reconnu 22 autres bâtards.
  • La Voisin emporte ce secret avec elle, ce qui rend sa mort plus étrange encore. 
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Destins 

  • Le roi ne fait rien contre la marquise, mère de quatre de ses six enfants légitimés, mais elle perd toute influence et après quelques années se retire au couvent. En étalant des bijoux cadeaux du roi et ne se souvenant pas des circonstances, elle dit que sa vie n'a eu aucun sens. 
  • La femme de chambre prend sa retraite avec une pension. Sa fille, qui se sait de sang royale et ressemble à son père, doit se contenter d'un mariage médiocre. 
  • La progression de l'enquête terrifie les courtisans. Quand Olympe Mancini reçoit un avertissement du roi en souvenir de leur longue amitié, elle pose ses cartes de jeu, monte dans son carrosse et se sauve à l'étranger pour ne jamais revenir.
D'autres sont bannis, une punition douce pour le meurtre, surtout quand le roi peut pardonner.

  • Quelques prisonniers de milieux populaires sont libérés, mais soixante-huit passent le reste de leurs vies enchaînés aux murs de donjons. Le dernier est mort en 1725.

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 Ces drames...

  • Conduisent à la première loi régulant la vente de produits toxiques (en 1682), qui fonctionne toujours. Elle aide a expliquer la fin des empoisonnements de masse. 
D'autres raisons pour cette disparition : la mise à l'écart des nombreux criminels, leur terrifiante punition et surtout, des connaissances médicales qui facilitent l'identification de poison pendant les autopsies.  

  • Révèlent le revers cauchemardesque du plus célèbre règne français, sensé avoir été un temps de gloire, d'équilibre et de raison.

Jean Prevost Higa, Canalblog

  • La Voisin, la sorcière de Blanche Neige ? « L'Affaire des poisons » était si connue en Europe qu'on croyait tout Français empoisonneur : les narrateurs ont du penser à La Voisin en étoffant leur conte. 
    -- Tout Français empoisonneur : Petitfils

Le film de Disney
Internet, sans source

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Le salon de thé face à l'église

ramène à un présent rassurant.

Les 2 au coin
 7 rue Notre-Dame de Bonne-Nouvelle

Du moins on l'espère telle.

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Suite,




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